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gb An American Werewolf in London ![]() ![]() |
![]() Talk radio est une sorte de parenthèse, un film complètement à part dans la filmographie d’Oliver stone. Il arrive après les succès de Platoon et Wall street et va servir à combler l’attente de son acteur principal pour qu’il puisse tourner son film suivant: Né un 4 juillet. Tom Cruise est en effet retenu par le tournage de Rain man. Oliver Stone en profite pour réaliser un petit film au budget anémique. Il pense occuper son temps avec un projet simple à réaliser mais il se lance en fait le pire des challenges: filmer un type qui parle tout seul pendant 1h40. Parce que le sujet est bien le suivant: l’avènement des radios libres et la place offerte aux auditeurs pour s’exprimer sur les ondes. Le film, traité par Stone ne va pas se contenter de faire du politiquement correct à l’image du film de Richard Curtis, Good morning England. Le film va devenir directement sociologiquement et politiquement engagé. L’animateur radio, à l’image d’un Howard Stern maintenant est sur les ondes pour des besoins un peu narcissiques. Il aime manipuler les auditeurs, les provoquer, les énerver. Il veut ainsi créer de l’action de la vie dans son émission en exploitant non pas le meilleur que l’Amérique a à offrir mais le pire. Ce ne sont pas les grands discours qui vont rythmer le récit mais les joutes, les contestations et la violence verbale qui s’en dégagent. Son émission ayant acquis une certaine popularité pour son franc parler, on commence le film au moment où un grand ponte d’une radio nationale propose à l’animateur que son émission devienne nationale. Ce dernier est miné par une vie personnelle instable et son show fait de lui une des personnes les plus haïes du Texas. Barry Champlain, puisque c’est le nom du personnage principal, va tester les limites du système au cours d’une nuit épique qui laissera des traces. ![]() Ce qu’il faut savoir et ce dont on se doute quand on voit ce type de sujet: il s’agit en fait de l’adaptation d’une pièce d’Eric Bogosian. Si ce nom ne vous dit rien, vous êtes un peu dans la même position que moi dont le seul souvenir qu’il ait laissé, c’est sa prestation en méchant dans le très oubliable Piège à grande vitesse. Pour les amateurs de séries, ce sera certainement plus facile de l’identifier comme le Capitaine Danny Ross de New-York section criminelle. En fait, à l’époque il semble qu’il était surtout ce que les américains appellent un performance artist: un auteur qui se lançait seul sur scène essayant de créer quelque chose avec la participation du public. Tout ça pour dire qu’il avait écrit la pièce en un seul acte qui s’appelait Talk radio et dont Stone se retrouva avec les droits en main. Comme il sentait que le matériau était un peu léger il va collaborer avec Bogosian pour améliorer le script et y incorporer des éléments de la vie d’un vrai animateur radio nommé Alan Berg. Du coup, qui de meilleur pour interpréter ce rôle que celui qui avait écrit la pièce d’origine et qui l’avait déjà interprétée à de nombreuses reprises. Malgré la pression du studio qui voulait imposer un grand nom, c’est bien Bogosian qui va tenir le rôle à l’écran. Et quel choix mesdames et messieurs. Dans tous les plans du film, il semble possédé par le rôle, presque en transe et la mise en scène de Stone magnifie cette performance. Le film n’est pas exempt de défauts, loin de là. Le flashback rajouté au milieu du film, même si il sert de respiration nécessaire et transmet les éléments d’exposition qui manquaient jusque là pour amener le récit à sa fin plombe un peu le film. Même si il est peu probable que le film n’aurait pas pu tenir une heure et demi dans la pièce d’enregistrement du show, le filmage de Stone sur ces séquences est tellement précis et fiévreux que tout le reste semble un peu trop léger. En effet, le vrai tour de force est là: Bacri qui disait que le film Didier constituait une de ses pires expériences, car Chabat en face de lui ne lui donnait pas la réplique n’aurait sans doute pas apprécié jouer dans ce film. Ici, Bogosian est tout seul, face à son micro et doit donner le rythme au film par sa présence et sa façon de parler. Pour que l’on soit à ce point accroché du début à la fin à ses moindres paroles, c’est une performance comme je n’en ai que rarement vues. ![]() J’en profite pour faire une petite parenthèse: Quand je dis rarement vues cela ne signifie pas jamais vue. En fait dans sa façon de transgresser les tabous et systématiquement se foutre de l’avis des autres jusqu’à se mettre tout le monde à bout, on retrouve beaucoup d’un autre film majeur sorti quatorze ans plus tôt, Lenny, un film de Bob Fosse qui offrait à Dustin Hoffman un de ses rôles les plus impressionnants. Si vous avez l’occasion de le voir c’est un film remarquable. Fin de la parenthèse. Bien sûr, pour que tout aille pour le mieux dans le meilleur des mondes, une grande performance se fait à l'unisson d’un grand casting. L’ensemble est impeccable et on y retrouve entre autres un Alec Baldwin impeccable en patron de radio. La mise en scène de Stone même si elle semble discrète au départ est magistrale et devient, à l’aide du montage et de la photo blafarde de Robert Richardson, de plus en plus précise et folle au fur et à mesure que le film avance dans la nuit. Au final, ce qui peut sembler comme un film d’Oliver Stone mineur, parce que trop méconnu, reste un film assez fascinant par le pouvoir d’attraction/répulsion qu’exerce le personnage principal. Il teste et provoque notre côté voyeur et en cela préfigure avec dix ans d’avance les dérives de la téléréalité. Le film reste d’actualité parce que le spectateur doit enfin se poser les questions essentielles qui sont posées par ce film mais sans en imposer les réponses. Quelle doit être notre réaction face à ce déballage quotidien de misère sociale et sentimentale? A chacun de se faire son opinion. Au final, Talk radio est un film d’une grande pertinence, même encore aujourd’hui et qui mérite qu’on le redécouvre. 5/6 comme le signale Oliver Stone lui-même, c’est le premier film où il ne filme pas un héros et il sera une étape essentielle qui le mènera à la réalisation d’autres films sur des anti-héros que sont Nixon et W. Titre original: Talk radio Réalisateur: Oliver Stone Année: 1988 Durée: 1h50 |
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